On m’appelle Key, Raymond Key. Il y a 10 ans, j’ai été recruté par le capitaine du Libertalia. Comme je m’y connaissais pas mal en poudres de toutes sortes, je suis devenu armurier. Et comme c'est moi qui m'occupais des flingues, je recevais une bonne part des butins. Bref, tout allait bien, mordious! Mon seul problème, c’était ma gueule. À faire peur à tous les morveux de Tortuga. Et donc aux filles aussi.

Un jour, à Rio, le tavernier m’a parlé d’un truc: le relooking, ça s’appelait. J’ai pas très bien tout compris. Et la serveuse, elle disait que, contre quelques doublons, une sorte d’enchanteresse du coin pouvait me transformer en bellâtre. Alors, j’ai été voir cette Cristina. Mais en me voyant, elle s’est mise à crier : «Mais mon chériii ! Comment tu veux que je fasse ? Je peux quand même pas faire des miracles ! Avec ta tronche, je peux pas te rendre magnifaïque !».

Dépité, je suis retourné au port. Là, j’ai croisé l’officier français et j’y ai raconté ma mésaventure. Il m’a parlé d’un gars de son pays, un certain marin Vidberg qui vivait de l’autre côté de l’Atlantique. Du coup, quand on a abordé à Brest, je me suis renseigné mais le bonhomme, il était pas marin et j’ai dû voyager pendant des semaines à dos d’âne pour gagner la Franche Comté. Et là, ce marin, ou Martin Vidberg, qui vivait dans un chalet rouge avec des murs tapissés de boîtes en carton, il a voulu me transformer en patate !

Alors, j’ai fui. Je suis retourné à Brest et nous avons repris la mer sur le Libertalia, avec un chargement de coffres et de tonneaux pour les Bahamas. Sur place, j’ai rencontré un certain Lamaro qui a accepté, en échange de quelques amulettes, de me refaire le portait.

Aujourd’hui, nous voguons vers Haïti et les vents de Galecrest balaient mon nouveau visage. Le cuisinier m’a dit que j’étais simiesque. Je sais pas ce que cela veut dire. M’en fous : les moutards de Tortuga n’auront plus peur de moi ! Au fait, quelqu’un a une banane ?

 

L'armurier, un personnage de «Libertalia - Les vents de Galecrest». Un jeu de Paolo Mori, illustré par Lamaro Smith et édité par Matagot.